La Bhagavad-Gîtâ est un Livre fondamental et l'un des plus révérés parmi les Ecritures hindoues.

700 versets, 18 chapitres :

 

Chapitre 1 Chapitre 4 Chapitre 7
     
Chapitre 2 Chapitre 5 Chapitre 8
     
Chapitre 3 Chapitre 6 Chapitre 9
     
Chapitre 10 Chapitre 11 Chapitre 12
     
Chapitre 13 Chapitre 14 Chapitre 15
     
Chapitre 16 Chapitre 17 Chapitre 18
     
    Glossaire

 

 

Krishna signifie avant tout « Le Noir » (dict.) et la Bhagavad-Gîtâ S'ouvre avec Celui qui est dans le Noir, avec Celui qui est dans la Nuit, avec Celui qui est aveugle, avec Celui qui demeure dans le Seigneur.

A noter que la Bible s'ouvre également dans la Nuit. Elle est la Révélation de la Nuit. C'est dans le Noir, dans la Nuit que « la lumière fut », que « la lumière » apparut que ce soit dans l'Ancien Testament ou dans le Nouveau Testament.

Le dictionnaire précise encore que la Bhagavad-Gîtâ a été rédigée entre le 3ème siècle avant Jésus-Christ et le 3ème siècle après Jésus Christ. Au cœur de la Bhagavad-Gîtâ, au cœur de la Nuit est la Lumière.

Bienheureux ceux qui demeurent dans la Nuit, Bienheureux ceux qui apprécieront ce langage poétique qui surpasse toute intelligence car en ne voyant plus les choses comme le monde, ils verront l'Unité de Dieu, l'Unité qui est au centre de toute la Création et ils en auront la Connaissance.

 


 

Et pour que soit ce Dialogue qui éclaire tout homme qui demeure dans la Nuit, il faut tout d'abord qu'Ils soient tout près l'un de l'autre, auprès l'un de l'autre, "réunis, désireux de livrer bataille " (bat).

Krishna signifie avant tout "le Noir" mais cela ne Lui interdit pas d'être "Bleu", d'avoir la couleur qui a traditionnellement et royalement été attribuée à Dieu, d'être dans le chariot d'Arjuna, d'être dans sa vie comme le sang qui coule dans ses veines ou encore comme la couleur du ciel qui se reflète dans ses yeux.

Et pour qu'il en soit ainsi, pour que Ce qu'Ils représentent, tous deux, soit entendu, pour ce Dialogue, la Bhagavad-Gîtâ s'ouvre avec "Dhritarâshtra" et avec une interrogation. Dans les écritures, Ce qui vient en premier est quelque chose de primordial, de fondamental qu'il n'est pas bon de négliger si l'on veut comprendre la suite.

 

   

« Dhritarâshtra dit : … ? » (1 :1)

 

 

L'interrogation. Mais qui est Celui qui "dit" ? Qui est Celui qui, au commencement, apparaît et S'exprime ? Qui est Celui que « la Parole » met en avant ? Qui est Celui qu'Elle met en tête ? De toute évidence, Il est « roi » et c'est avec Lui que la Bhagavad-Gîtâ S'ouvre, Se fait entendre et S'achève (voir la fin du chapitre 18) car Il est aveugle car Il est et demeure dans « le Noir » ! A la fin, lorsque toute la lumière sera faite, lorsque toute la Connaissance aura été dévoilée, sa royauté qui ne sautait pas aux yeux au commencement, qui n'était dite et que l'on ne pouvait qu'ignorer, sera exaltée, proclamée et même affichée par Celui qui lui rapporte toutes choses…

En principe, un roi digne de ce nom demeure sur son trône. Il ne voit pas de ses propres yeux ce qui se passe à « distance ». Ce sont ses sujets qui lui donnent à voir ce qui doit être vu, qui l'informent.

"Dhritarâshtra" est aveugle mais celui qui est aveugle développe d'autres sens. Il acquiert tout d'abord la capacité de sentir, de ressentir et même de pressentir "les choses" et c'est pourquoi Il interroge... Il se doute qu'il y a quelque chose d'important à connaître dans sa vie et que sa vue ne lui permet pas de saisir. Et étant aveugle son ouïe ne peut que s'affiner, que s'améliorer et Il devient capable d'écouter, capable d'accorder de l'importance à ce qui n'en présente généralement aucune. Ainsi, Il devient capable d'entendre "la Parole" suprême.

Comme on pourra facilement le remarquer dans le chapitre premier, la Bhagavad-Gîtâ est une Présentation, pour ne pas dire une Représentation matérielle d'une Réalité spirituelle, éternelle, universelle. Et Elle nous présente tout d'abord ce « roi » avec lequel elle S'ouvre éternellement, ce « roi » qui est pleinement conscient d'être aveugle, avec ce « roi » dont les yeux sont résolument fermés et qui ne voyant pas, ne connaissant pas, ne sachant pas Ce qu'il en est, Ce qui a été fait, Ce qui a été déployé, manifesté, la Réalité du terrain, la Réalité elle-même, interroge et même s'interroge car au commencement, il n'y a que Lui. Il est donc la clef ( ?) de la Connaissance, la clef qui, en tout homme, ouvre l'Intelligence, la clef qui ouvre la voie de celui qui, pressent qu'il y a autre chose de plus grand à connaître que tout ce qu'il sait. Il est la clef qui ouvre la Voie de celui qui chercher à accomplir, à réaliser, à connaître Ce que « la Parole » signifie et révèle.

"Dhritarâshtra" n'est pas seulement la clef, Il est aussi "le chef", le Mental avant-coureur dont il est question dans la première Stance de la Loi issue du pâli et que Jean représente dans l'évangile selon saint Jean (verset 6). A son sujet il est dit : "Celui-là n'était pas la lumière" (verset 8) mais sans Lui Elle ne saurait se produire car "la lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas arrêtée" (verset 5). Par contre la lumière du monde, la vision du monde y compris du monde dit religieux l'arrête immanquablement, ne permet pas de voir Ce qu'il y a de plus heureux et de plus désirable à connaître.

Ne pas voir pour voir. Ne pas voir de ses propres yeux pour voir avec d'autres yeux Ce qui vaut vraiment la peine d'être vu. Ne pas voir de ses propres yeux pour voir avec les yeux de son âme que le Seigneur ouvrira, dès lors que nous aurons pour Celui-là même qui est à l'origine de toute la Révélation, de toute la Création, suffisamment de considération, telle est la Pensée qui préside à l'Ouverture, à la Prière avec laquelle s'ouvre également "le Coran" qui est avant tout "le livre évident", celui qui est descendu "dans la nuit".

 

   

" De fait, ceux qui suivent cette voie tiennent presque toujours les yeux fermés en priant. Cette habitude est merveilleuse sous tous rapports - Sans doute, il faut se faire une certaine violence pour ne pas regarder les choses d'ici-bas, mais c'est au début seulement. Ensuite, il n'y a plus d'effort à faire, il en faudrait, au contraire, pour tenir les yeux ouverts." (Sainte Thérèse d'Avila – Le chemin de la perfection P119)

 

 

Les choses d'ici-bas dont parle sainte Thérèse d'Avila, ce sont les choses apparentes, les choses extérieures, qu'elles soient matérielles ou encore morales, auxquelles le monde accorde tant d'importance mais certainement pas celui qui est établi dans une bonne résolution et qui dit :

 

   

"1. J'en jure par le livre évident." (Coran 43:1) Et par rien d'autre ! Et par nul autre !

1. Nous avons fait descendre le Coran dans la nuit d'Al-qadr.

2. Qui te fera connaître ce que c'est que la nuit d'Al-qadr ?" (Coran 97:1)

 

 

C'est toujours dans la Nuit que la Lumière brille, que la Connaissance véritable, Celle qui est au Cœur de toute la Création, descend ... "Oui mais moi je sais ce qu'est le Coran, je sais ce qu'est Dieu, etc., etc., etc." disent ceux qui gardent les yeux ouverts, qui jurent par les choses de ce monde, qui répètent sans aucune conscience ce qu'ils ont entendu dire à droite et à gauche, ceux qui savent, ceux qui ne sont point dans la Nuit mais éclairés par la puissance du monde, par le "petit ego" qui croit tout savoir, qui se prend pour Dieu et qui cependant n'entend rien à Sa Parole.

 

   

"Qui te fera connaître ce que c'est que la nuit d'Al-qadr ?"

" D'abord, l'action [qui consiste à établir Dieu dans son cœur] est nécessaire, puis la connaissance, afin que tu puisses savoir que tu ne sais rien et que tu n'es rien. Ceci n'est pas facile à savoir. C'est une chose qui ne peut être enseignée vraiment, ni cousue avec une aiguille ou attachée avec un fil. C'est un don de Dieu. La vision du cœur [du latin Cor, la vision qui provient du Cœur] est ce qui compte, non la parole de la langue." (Abû Sa'îd ibn Abi'l-Khayr - Anthologie du soufisme P41)

 

 

Et non le verbiage insensé du "petit ego". Celui qui est aveugle, celui qui demeure dans la Nuit, a cessé de voir, ne voit plus les choses d'ici-bas, et s'il n'est pas encore tout à fait aveugle, tout à fait mort pour les choses de ce monde, il ne leur accorde plus aucune importance, ne jure plus par elles. Ses yeux se sont fermés, il n'a plus la vision du monde, la vision des choses superficielles, divisées, sectaires, stupides, mauvaises mais Celle de Dieu qui est sans aucune limite, sans cloisonnement aucun car Dieu est (à) l'origine de toute la Création (Genèse 1 :1) et il n'est jamais trop tard pour l'accepter sincèrement, pour le reconnaître honnêtement. L'honnêteté est une condition sine qua non de la vie religieuse, de la vie spirituelle.

Comme on pourra facilement le voir avec une Vision qui embrasse toute la Création, en ouvrant tous les chapitres, la Bhagavad-Gîtâ est le Livre de Connaissance de Soi et cette Connaissance est avant tout Celle qui est donnée, qui est livrée à Celui qui S'interroge et dont il prend conscience, connaissance en lui-même. Il serait plus juste de dire délivrée de celui qui s'interroge car elle est en lui mais retenue prisonnière aussi longtemps qu'il se maintient, aussi longtemps qu'il reste prépondérant. La Bhagavad-Gîtâ est le Livre de Connaissance de Soi, de la Connaissance de ce Roi, de cet Ego souverain, de cet être totalement conscient de son état, conscient de lui-même et que chacun se doit de considérer et avec lequel il est toujours possible de s'identifier, ne serait-ce que pour que Sa souveraineté, la Sienne, soit manifestée. Telle est la clef universelle de la Connaissance de Soi, la clef de la Science, la clef du Livre, la clef qui produit le Livre, qui le fait descendre, la clef qui nous livre la Connaissance de ce que nous sommes, le Shâstra. Bienheureux celui qui, ne voyant pas, interroge et sait attendre la réponse qui satisfait pleinement, la Réponse qui ne tarde jamais à venir.

Parce qu'Il ne voit pas, parce ses yeux sont résolument fermés, "Dhritarâshtra" (et non pas moi-je et non pas le petit ego arrogant qui croit tout savoir alors qu'il est spirituellement dans l'ignorance la plus totale. Il faut tout simplement accepter de le reconnaître) n'est pas aveuglé par ses propres perceptions, par les choses d'ici-bas. Bien au contraire, il est pleinement conscient d'être aveugle, alors Il interroge, Il S'interroge.

 

   

« 2. - Alors le prince Duryodhana, ayant vu, [ayant ainsi obtenu la vue]...  s'approcha de son maître et lui parla ainsi : 3. « Contemple... 4. Vois... » »

 

 

Alors Celui qui ne voyait pas contemple, voit... en tout et partout Ce qui est essentiel, primordial et utile pour chacun et pour tous. Et alors tout peut commencer à se révéler, la Sâdhanâ, le Chemin des plus hautes Révélations et des plus hautes Réalisations s'ouvre. Et tel est le principe évident, le principe qui chasse également l'impureté, l'orgueil avec la paille qui dans l'œil aveugle.

...

 

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